16 mai 2021

Disposition de dérogation et Disposition dérogatoire

Monsieur Salvet (Le Soleil),

On ne demande pas à un locuteur lambda de faire la distinction entre une « clause » et une « disposition », ni entre une « disposition de dérogation » et une « disposition dérogatoire ». Mais les professionnels de la langue – vous en êtes – devraient pouvoir les faire.

Essentiellement, une clause s’applique à des actes juridiques de nature privée, c’est-à-dire à des conventions, des contrats, des traités ou à des testaments. Et non à des lois. Le mot idoine en relation avec une loi est « disposition ». Quant au mot anglais « clause », qu’on répète sans trop s’y arrêter, il s’applique à la fois à la législation ou à des actes privés. En somme, on ne devrait pas écrire « clause » lorsqu’il s’agit de protéger une décision des parlementaires exprimée dans les lois et de lui offrir un bouclier.

Il faut plutôt parler de « disposition dérogatoire » ou de « disposition de dérogation ». Celle-ci, la disposition de dérogation, ouvre la voie à celle-là, la disposition dérogatoire. Ainsi, l’Assemblée nationale peut adopter une disposition dérogatoire permise par une disposition de dérogation d’une autre loi ou d’une charte. 

Ainsi, logiquement, vous auriez dû écrire, dans l’article intitulé « Pour nos ancêtres? (15 mai, p. 10) : « Mme Anglade n’a même pas trouvé à redire sur le recours à la disposition de dérogation » (fédérale). Par ailleurs, vous auriez pu écrire : «… sur l’adoption d’une disposition dérogatoire par l’Assemblée nationale ». 

Il y va du sens des mots mais aussi, pour la circonstance, de la qualité de la langue et de son enrichissement. Vos collègues et vos homologues n’ont pas toujours le loisir de s’arrêter aux distinctions à garder en mémoire. Mais celles relevées ici devraient vous servir et leur servir au cours des semaines à venir.

Un membre de l’Asulf (www.asulf.org)

Gaston Bernier